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Les origines il y a plus de 300 ans.

Dans les premières années du XVIIIe siècle, des notables bordelais, en particulier des conseillers au Parlement, se réunissaient pour converser et échanger sur les sciences, les arts, la littérature et pour écouter de la musique. Ce cercle s’élargissant, ses membres sollicitèrent, avec l’aide d’Henri-Jacques Nompar de Caumont, duc de La Force, proche du roi, l’autorisation de se constituer en académie. Louis XIV accepta par lettres patentes données à Fontainebleau le 5 septembre 1712, puis enregistrées par le Parlement de Bordeaux le 3 mai 1713. L’année 1712 marque donc la naissance de l’Académie Royale des Sciences, Belles-Lettres et Arts de Bordeaux, ce qui en fait une des plus anciennes sociétés savantes de France ; seules l’Académie des Jeux Floraux de Toulouse et les deux Académies d’Arles et de Nîmes sont, en dehors des Académies de l’Institut de France, plus anciennes que celle de Bordeaux. L’Académie se choisit pour protecteur le duc de la Force, pair de France, membre de l’Académie française (1715) et de l’Académie des sciences (1718), membre du Conseil de régence à la mort de Louis XIV. Les fondateurs comptaient plusieurs membres du Parlement, dont Antoine de Gasc, président à mortier, premier directeur de l’Académie en 1713, Jean-Baptiste de Caupos, André-François-Benoît Leberthon, Louis-François de César, mais aussi Isaac Sarrau, musicologue, compositeur et chef d’orchestre.
Le 20 mai 1713 se déroula l’ouverture solennelle de l’Académie dans la chapelle du collège de Guyenne.

Les premières décennies. Montesquieu.

Le 3 avril 1716, Louis-Charles de Secondat, baron de la Brède et de Montesquieu, fut élu à l’Académie de Bordeaux. Le plus prestigieux de ses membres devait en être ensuite à quatre reprises le directeur annuel, en 1718, 1726, 1735 et 1748, année de la parution de L’esprit des lois.
Jean-Jacques Bel, avocat, conseiller au Parlement, élu en 1736, fut le grand mécène de l’Académie à laquelle il légua à sa mort, en 1739, son somptueux hôtel particulier situé sur l’esplanade du château Trompette, aujourd’hui Allées de Tourny, et sa bibliothèque.
Si elle était bien, dès sa création, une société pluridisciplinaire, l’Académie bordelaise est restée longtemps tournée vers les sciences, fidèle en cela au mouvement de vulgarisation scientifique qui marque la fin du XVIIe siècle et le début du XVIIIe siècle. Dès 1714, le duc de la Force institua un prix de physique destiné à récompenser des savants dans toute l’Europe et l’Académie de Bordeaux devint rapidement une société savante réputée. Montesquieu, lui-même, participa à ces activités scientifiques et son fils Jean-Baptiste, baron de Secondat, élu en 1734, fut un brillant physicien.
A partir de 1730 et jusqu’à la Révolution, la recherche scientifique a laissé peu à peu la prééminence à la médecine. Dans ces premières décennies, il convient de citer aussi les travaux des abbés Jules Bellet, un des fondateurs de l’Académie, de Jacques Baurein, ainsi que ceux du chanoine Louis-Mathieu Desbiey, travaux tournés vers l’économie et les questions de société.
Jusqu’à la Révolution, l’Académie bénéficia d’un protecteur officiel : après le duc de la Force, se succédèrent le comte de Morville, le cardinal de Polignac et enfin Louis-François-Armand du Plessis, duc de Richelieu, gouverneur de Guyenne, tous membres de l’Académie française. Aujourd’hui le maire de Bordeaux assure cette fonction honorifique.

La Révolution : la disparition des Académies.

A la Révolution, comme toutes les Académies, celle de Bordeaux fut supprimée à la suite de la motion de l’abbé Grégoire votée par la Convention le 22 avril 1793, et ses biens furent nationalisés.
La compagnie réapparut en 1796, sous la forme d’une Société d’Histoire Naturelle et d’Agriculture, puis en 1797 d’une Société des Sciences, Belles-Lettres et Arts.

La renaissance de l’Académie de Bordeaux.

L’Académie de Bordeaux se reconstitua en tant qu’académie sous la Restauration, en 1814, et par ordonnance de Charles X du 13 août 1828, elle reprit son nom d’Académie Royale des Sciences, Belles-Lettres et Arts de Bordeaux et fut déclarée d’utilité publique. Le règlement de l’Académie a été approuvé en 1839 par le ministre de l’Instruction publique. Sous le Second Empire, elle devint Académie Impériale, avant de prendre en 1870 le titre qui est encore aujourd’hui le sien : Académie Nationale des Sciences, Belles-Lettres et Arts de Bordeaux.
Tout au long du XIXe siècle, les centres d’intérêt de l’Académie se diversifièrent : le droit, l’histoire, les lettres, la physique et la chimie, ou encore les sciences naturelles et la géologie. La médecine tient une place particulière, l’Académie a compté dans ses rangs des médecins prestigieux, souvent pionniers de leur spécialité en France.

L’Académie aujourd’hui.

Au fil du XXe siècle, la place de l’Académie de Bordeaux s’est confirmée : elle contribue au développement des idées, elle soutient les recherches et les travaux scientifiques, elle aide à la création littéraire et artistique. Elle participe ainsi au prestige et au rayonnement de la ville de Bordeaux et de la région Aquitaine.
Des universitaires y tiennent une place importante, mais les académiciens ont le souci, à chaque nouvelle élection, de maintenir une composition pluridisciplinaire variée, en élisant des membres de tous horizons, chacun apportant ses connaissances et son originalité dans les domaines les plus divers.
Près de 80 académiciens de Bordeaux ont été honorés par la dédicace d’une voie publique à leur nom.

Quelques académiciens remarquables au fil de trois siècles d’existence.

La diversité des académiciens apparaît au travers de nombreux exemples. Outre bien sûr Montesquieu, le plus prestigieux des académiciens bordelais, retenons ainsi dans une liste loin d’être exhaustive :

–    le marquis Louis-Urbain de Tourny, reçu en 1744, intendant de Guyenne, le grand urbaniste de la ville de Bordeaux ;
–    le prince Charles-Juste de Beauvau, élu en 1766, lieutenant-général des armées du roi, membre de l’Académie française ;
–    André-Daniel Laffon de Ladebat, reçu en 1776, membre d’une grande famille d’armateurs qui se fit le défenseur de la lutte
     contre l’esclavage ;
–    le peintre Pierre Lacour, élu en 1797 ;
–    le musicien Franz Beck, reçu en 1797, premier chef d’orchestre du Grand Théâtre ;

–    Louis Combes, architecte, reçu en 1797, champion de l’architecture néo-classique à Bordeaux ;
–    le comte Jean-Baptiste Lynch, reçu en 1809, maire de Bordeaux, pair de France ;
–    Dominique Maggesi, sculpteur, reçu en 1833, statuaire officiel de la Ville ;
–    Léo Drouyn, reçu en 1850, peintre, graveur, historien et archéologue ;

–    le comte Charles-Ignace de Peyronnet, reçu en 1851, Garde des sceaux et ministre de l’Intérieur sous Louis XVIII et Charles X ;
–    Ulysse Gayon, reçu en 1884, chimiste, et Alexis Millardet, reçu en 1888, botaniste, sauveteurs du vignoble en France par leurs
      recherches et la  mise au point de la Bouillie bordelaise ;
–    Camille Jullian, reçu en 1887, membre de l’Académie française, historien de Bordeaux et des Gaules ;
–    Jean Bergonié, reçu en 1895, docteur en médecine, fondateur à Bordeaux du premier établissement hospitalier spécialisé dans la
     lutte contre le cancer en France ;

–    Mgr Maurice Feltin, reçu en 1943, archevêque de Bordeaux puis cardinal de Paris ;
–    Gabriel Delaunay, reçu en 1972, résistant, président de l’ORTF, préfet d’Aquitaine et conseiller d’Etat ;
–    Arlette Higounet-Nadal, première femme élue à l’Académie de Bordeaux en 1990, historienne.

Les sièges de l’Académie.

Au cours de ses trois siècles d’existence, l’Académie de Bordeaux a changé plusieurs fois de résidence. Jusqu’en 1739, elle n’avait  pas de siège particulier et les académiciens se réunissaient le plus souvent au couvent des Recollets, ou, à partir de 1731, dans une des salles du Parlement.
En 1739, Jean-Jacques Bel lègue à l’Académie son hôtel particulier ainsi que sa riche bibliothèque. L’Académie en fit sa résidence et y restera jusqu’à la Révolution. L’hôtel fut transformé en 1793 en bibliothèque municipale et en musée. Toutefois l’Académie continua à bénéficier de ce lieu jusqu’en 1890.
Elle siégea ensuite l’Athénée municipal jusqu’en 1939, année où elle s’installa dans l’hôtel de Ragueneau, rue du Loup, aménagé pour les archives municipales par l’architecte Jacques D’Welles, académicien.
En 1966, la ville acquit l’hôtel Calvet, place Bardineau, qu’elle affecta aux sociétés savantes. Après sa rénovation, le maire, protecteur de l’Académie,  lui remet le 8 mai 1978 les clés de cet hôtel construit en 1851 par l’architecte municipal Charles Burguet.
Les salons de l’Académie conservent une série de portraits d’académiciens, des gravures, des porcelaines, ainsi qu’une belle collection de médailles.